Le livre que vous venez de terminer
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Re: Le livre que vous venez de terminer
C'est exactement comme ça que je l'ai perçu à l'époque où je l'ai lu (il y a plus de 15 ans). C'est un livre dont j'ai eu beaucoup de mal à me remettre, c'est ce qui fait la force de ces oeuvres-là.hipnik a écrit:Un grand coup de poing, pas vraiment optimiste !
L'écriture est "particulière" mais on a vraiment cette sensation d'aller jusqu'au bout des choses, si je puis dire.
Snufkin- Messages : 21
Date d'inscription : 26/01/2013
Re: Le livre que vous venez de terminer
Le traducteur ne connaît qu'un seul mot pour "boire" : siroter ! Ça finit par être agaçant, "siroter" un whisky, un café...
neo-codion- Messages : 1946
Date d'inscription : 03/08/2011
Littérature enfantine
Ta réflexion me fait rire Néo parce que ce mot, siroter, fait très Enyd Blyton et que ces jours-ci je me suis mise à relire les livres que je lisais lorsque j'étais enfant, les Georges Chaulet, Fantômette bien sûr et les Béatrice (Une rapière pour Béatrice, Béatrice au grand galop...) et que, j'avoue, j'y ai pris grand plaisir ! Lol !
Durga- Admin
- Messages : 2792
Date d'inscription : 01/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
Mes souvenirs de lectures d'enfance : la peau de chagrin (Balzac) et Papa faucheux (Jean Webster)
creme_de_marron- Messages : 595
Date d'inscription : 01/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
Jules Verne, Stevenson (L'île au trésor), Gustave Aymard !
Mr_Nostalgia- Admin
- Messages : 309
Date d'inscription : 01/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
C'est plutôt l'année dernière que je l'ai lu, mais comme il en est question dans une autre rubrique du forum, je mentionne ici un livre au sujet de Richard Stallman, un chercheur américain en désaccord avec l'évolution des logiciels dans les années 80, qui de produits non commerciaux dont chacun pouvait examiner le contenu et l'adapter à ses besoins, sont devenus pour certains d'entre eux des "boites noires" dans lesquelles seule l'entreprise qui les a conçu et les vend peut intervenir pour corriger les défauts, ou rajouter des fonctionnalités.
Pour contrecarrer cette évolution, Richard Stallman est à l'origine du concept de "logiciels libres" basé sur le partage, la libre utilisation et la collaboration des développeurs.
Le livre vendu en version papier mais également téléchargeable et consultable sur Internet gratuitement :
http://framabook.org/richard-stallman-et-la-revolution-du-logiciel-libre
Pour contrecarrer cette évolution, Richard Stallman est à l'origine du concept de "logiciels libres" basé sur le partage, la libre utilisation et la collaboration des développeurs.
Le livre vendu en version papier mais également téléchargeable et consultable sur Internet gratuitement :
http://framabook.org/richard-stallman-et-la-revolution-du-logiciel-libre
Re: Le livre que vous venez de terminer
Dernier livre lu : un texte de Jacques Prévert "Des bêtes" sur des photos de Ylla...
Un beau livre paru en 1950 chez Gallimard et trouvé récemment dans une poubelle près de chez moi...
Dans la même poubelle, le même soir, j'ai trouvé aussi (mais pas encore lu) :
-Fromm, Le langage oublié, introduction à la compréhension des rêves, des contes et des mythes
-Pierre-Christian Guiollard, Guide pratique du chercheur d'or en France
Un beau livre paru en 1950 chez Gallimard et trouvé récemment dans une poubelle près de chez moi...
Dans la même poubelle, le même soir, j'ai trouvé aussi (mais pas encore lu) :
-Fromm, Le langage oublié, introduction à la compréhension des rêves, des contes et des mythes
-Pierre-Christian Guiollard, Guide pratique du chercheur d'or en France
hippium- Messages : 1819
Date d'inscription : 01/08/2011
Age : 44
Re: Le livre que vous venez de terminer
Faites l'amour, pas la guerre ! de Françoize Boucher, éditions Marabout
Dans cet ouvrage très librement inspiré du Kama-sutra, Françoize Boucher délivre avec humour et sans complexe ses conseils en matière de sexualité : un livre à lire (seul ou à plusieurs) pour rire, apprendre et encore rire !
Dans cet ouvrage très librement inspiré du Kama-sutra, Françoize Boucher délivre avec humour et sans complexe ses conseils en matière de sexualité : un livre à lire (seul ou à plusieurs) pour rire, apprendre et encore rire !
patchouli- Messages : 269
Date d'inscription : 13/08/2011
Age : 73
Localisation : Région lilloise
Re: Le livre que vous venez de terminer
Ce n'est pas le dernier livre que j'ai lu puisque je l'ai lu lorsqu'il est sorti en 1977...
Son auteur était passé à Apostrophes.
C'est un conte de politique fiction sur l'absurdité du monde et un peu sur l'enfer que sont les autres...
C'était surtout un très beau livre écrit par Rafael Pividal, véritable très grand écrivain et philosophe aujourd'hui oublié et frère de Jorge, dit le "petit Georges" qui nous servait des canons chez Georges, à nous les amis de Georges...
Rafael Pividal, Pays Sages, éditions Rupture 1977
Son auteur était passé à Apostrophes.
C'est un conte de politique fiction sur l'absurdité du monde et un peu sur l'enfer que sont les autres...
C'était surtout un très beau livre écrit par Rafael Pividal, véritable très grand écrivain et philosophe aujourd'hui oublié et frère de Jorge, dit le "petit Georges" qui nous servait des canons chez Georges, à nous les amis de Georges...
Rafael Pividal, Pays Sages, éditions Rupture 1977
Dr_Natural- Messages : 1663
Date d'inscription : 02/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
Speed de William Burroughs Junior , fils de son père, le pape des beatniks et comme son père tirant accidentellement avec une arme à feu sur une personne chère, vie brûlée et mort à 34 ans.
Speed, son premier roman sorti en 1970 et traduit en français en 2009 est une véritable démystification du mouvement hippie, très loin du "flower power", qui en évoque les aspects les plus sordides. Et il sait de quoi il parle, il l'a connu de l'intérieur !
Speed - William Burroughs Jr (traduction de Patrice Carrer) 13e note éditions - octobre 2009
Speed, son premier roman sorti en 1970 et traduit en français en 2009 est une véritable démystification du mouvement hippie, très loin du "flower power", qui en évoque les aspects les plus sordides. Et il sait de quoi il parle, il l'a connu de l'intérieur !
Speed - William Burroughs Jr (traduction de Patrice Carrer) 13e note éditions - octobre 2009
hipnik- Messages : 1554
Date d'inscription : 01/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
J'en profite pour citer un livre sorti également en France en 2009 sur le même sujet "L'Amérique" de Joan Didion, différentes nouvelles où il est question de communautés hippies de San Francisco "où l'on vole, viole et se défonce, plus qu'on se pare de fleurs..."
L'Amérique, de Joan Didion chez Grasset (avril 2009)
L'Amérique, de Joan Didion chez Grasset (avril 2009)
hipnik- Messages : 1554
Date d'inscription : 01/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
Je ne sais pas comment on doit lire ces deux livres, hipnik ?
Durga- Admin
- Messages : 2792
Date d'inscription : 01/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
Probablement comme des témoignages de ce que fut vraiment majoritairement le mouvement hippie, très loin du "peace and love" gentillet habituellement admis...
C'est ce que ne nous a cessé de dire Dr_Natural !!!
C'est ce que ne nous a cessé de dire Dr_Natural !!!
hippium- Messages : 1819
Date d'inscription : 01/08/2011
Age : 44
Re: Le livre que vous venez de terminer
Dernier livre lu "Sand et Ségur" un essai de Dominique Bussillet (Editions Cahiers du Temps, Cabourg 2009) dans lequel l'auteure met en parallèle les vies et les oeuvres d'Aurore Dupin dite George Sand (1804-1876) et de Sophie Rostopchine plus connue sous le nom de Comtesse de Ségur (1799-1874)
En apparence très dissemblables, nous découvrons finalement une Ségur moins lisse qu'on pourrait croire, une Sand moins scandaleuse qu'il n'y parait...
Deux femmes (féministes à leur façon avant l'heure) qui ont su, seules, mener leurs affaires, et dont les conceptions politiques apparemment opposées font toutefois chez l'une et l'autre une grande place aux plus faibles, aux pauvres et au monde paysan... Assez proche finalement dans leurs rêves d'une société idéale et même dans leurs tentatives de créer une utopie...
En apparence très dissemblables, nous découvrons finalement une Ségur moins lisse qu'on pourrait croire, une Sand moins scandaleuse qu'il n'y parait...
Deux femmes (féministes à leur façon avant l'heure) qui ont su, seules, mener leurs affaires, et dont les conceptions politiques apparemment opposées font toutefois chez l'une et l'autre une grande place aux plus faibles, aux pauvres et au monde paysan... Assez proche finalement dans leurs rêves d'une société idéale et même dans leurs tentatives de créer une utopie...
creme_de_marron- Messages : 595
Date d'inscription : 01/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
hippium a écrit:
C'est ce que ne nous a cessé de dire Dr_Natural !!!
Exact !!
@ creme_de_marron : je vois que tu succombes à la mode de parler d'auteureu !
Dr_Natural- Messages : 1663
Date d'inscription : 02/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
Jean-Claude Guillebaud : Une autre vie est possible, L'Iconoclaste - 14 €
Je l'ai trouvé moins fort et moins écrit que ses livres précédents, mais tout de même j'ai beaucoup aimé.
Guillebaud nous invite, face à la desespérance contemporaine et à la culture de l'inespoir, à ne pas abandonner le monde aux méchants, au "tout-marché" et au crétinisme qui colonise les esprit.
En prenant comme point de référence les colères de Bernanos, Charles Péguy, Pierre Bourdieu, André Gorz et Chesterton, il nous enjoint au contraire à avoir une nostalgie agissante dans cette société qui "n'est plus un tout mais un tas" (Régis Debray).
Très sévère envers les faux combats pseudo-révolutionnaires (pseudo "féminisme", et luttes actuelles pour des sexualités différentes et les diversités, cyberrévolution), il nous rappelle une évidence, et valide ainsi les options des décroissants : la croissance ne peut pas être illimitée dans un monde limité...
Je l'ai trouvé moins fort et moins écrit que ses livres précédents, mais tout de même j'ai beaucoup aimé.
Guillebaud nous invite, face à la desespérance contemporaine et à la culture de l'inespoir, à ne pas abandonner le monde aux méchants, au "tout-marché" et au crétinisme qui colonise les esprit.
En prenant comme point de référence les colères de Bernanos, Charles Péguy, Pierre Bourdieu, André Gorz et Chesterton, il nous enjoint au contraire à avoir une nostalgie agissante dans cette société qui "n'est plus un tout mais un tas" (Régis Debray).
Très sévère envers les faux combats pseudo-révolutionnaires (pseudo "féminisme", et luttes actuelles pour des sexualités différentes et les diversités, cyberrévolution), il nous rappelle une évidence, et valide ainsi les options des décroissants : la croissance ne peut pas être illimitée dans un monde limité...
patchouli- Messages : 269
Date d'inscription : 13/08/2011
Age : 73
Localisation : Région lilloise
Re: Le livre que vous venez de terminer
Le crétinisme qui colonise les esprit...
Tellement vrai !
Dr_Natural- Messages : 1663
Date d'inscription : 02/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
Et en plus j'aime bien le titre !
patchouli- Messages : 269
Date d'inscription : 13/08/2011
Age : 73
Localisation : Région lilloise
Re: Le livre que vous venez de terminer
Juste encore une petite précision : dans ce livre Guillebaud révèle que son père est mort en...1973 !
patchouli- Messages : 269
Date d'inscription : 13/08/2011
Age : 73
Localisation : Région lilloise
Albert Cossery
Albert Cossery nous le rencontrions dans tous les cafés de Saint Germain des Près dans les années 60/70...
Je ne m'étais jamais lancée, à l'époque, dans la lecture de ses livres et voici que je viens pour la première fois en lire un.
Il s'agit de son chef d'œuvre (cultivant une image de paresseux, il n'a écrit que sept livres...) Mendiants et orgueilleux (éditions Joelle Losfeld) : un policier homosexuel du Caire enquête sur l'assassinat d'une prostituée. Son enquête le conduit dans les milieux interlopes et miséreux de la capitale égyptienne, notamment auprès d'une communauté de trois marginaux, un ancien professeur de philosophie, un poète et un revendeur de haschich. Découvrant que l'auteur du crime est l'un d'eux, il ne le dénoncera pas mais démissionnera de la police pour rejoindre le groupe...
L'écriture est magnifique, dans un français d'une beauté que seuls ceux dont le français n'était pas la langue maternelle et qui ont fait pourtant le choix de la prendre comme langue d'écriture sont encore capables...
Albert Cossery mort en 2008 a vécu toute sa vie dans un hôtel du Quartier Latin, La Louisiane au 60 rue de Seine, et qui avait été surnommé l'hôtel des beatniks dans les années 60...
Je ne m'étais jamais lancée, à l'époque, dans la lecture de ses livres et voici que je viens pour la première fois en lire un.
Il s'agit de son chef d'œuvre (cultivant une image de paresseux, il n'a écrit que sept livres...) Mendiants et orgueilleux (éditions Joelle Losfeld) : un policier homosexuel du Caire enquête sur l'assassinat d'une prostituée. Son enquête le conduit dans les milieux interlopes et miséreux de la capitale égyptienne, notamment auprès d'une communauté de trois marginaux, un ancien professeur de philosophie, un poète et un revendeur de haschich. Découvrant que l'auteur du crime est l'un d'eux, il ne le dénoncera pas mais démissionnera de la police pour rejoindre le groupe...
L'écriture est magnifique, dans un français d'une beauté que seuls ceux dont le français n'était pas la langue maternelle et qui ont fait pourtant le choix de la prendre comme langue d'écriture sont encore capables...
Albert Cossery mort en 2008 a vécu toute sa vie dans un hôtel du Quartier Latin, La Louisiane au 60 rue de Seine, et qui avait été surnommé l'hôtel des beatniks dans les années 60...
creme_de_marron- Messages : 595
Date d'inscription : 01/08/2011
Albert Cossery
Portrait d'Albert Cossery, l'hôte de la chambre 58
Par Alexie Lorca (Lire 01/12/1999)
Depuis 50 ans, l'écrivain égyptien vit dans un hôtel de Saint-Germain-des-Prés. Le «mendiant philosophe» a érigé la paresse en véritable art de vivre.
C'est un hôtel rue de Seine, dont les fenêtres s'ouvrent sur l'étal d'un marchand de quatre-saisons. L'enseigne déroule sur le mur blanc ses hautes lettres: La Louisiane. Un voyageur sans bagage y débarque un jour de 1952. Albert Cossery a quitté Le Caire sept ans plus tôt pour vivre à Paris. Destination logique pour un Egyptien qui a suivi toute sa scolarité dans des écoles françaises et écrit dans la langue de Molière. Ses parents sont morts depuis longtemps. Il a trente-deux ans, un peu d'argent et sous le bras un recueil de nouvelles, Les hommes oubliés de Dieu, qu'Henry Miller vient de publier aux Etats-Unis et que l'éditeur Edmond Charlot fait paraître en France.
Albert s'amuse. Le jour, il dort à Montmartre; la nuit, il fait la fête à Saint-Germain-des-Prés. Mais les dames qui le suivent chez lui sur le coup de quatre heures du matin se lassent: "Je leur disais, viens, c'est tout près; au bout d'une heure de marche, elles en avaient marre et je n'avais pas de quoi payer un taxi. Alors, j'ai laissé mon studio et je me suis installé à La Louisiane. J'y connaissais des filles..." A l'époque, l'hôtel accueillait une bonne partie de la gent littéraire et artistique germanopratine. Gréco, Sartre, Beauvoir, Mouloudji... y feront quelques séjours, le temps d'une jeunesse engagée ou désabusée. Cossery y reste. La chambre 58 devient son unique lieu d'écriture, le miroir parfait d'un homme qui n'a d'autre ambition que de jouir de la vie, le reflet exact d'une oeuvre qui érige le dénuement en philosophie.
En ce jour d'octobre, le vieux monsieur longiligne à la mise parfaite qui nous reçoit dans le salon de l'hôtel rechigne à montrer cette chambre devenue légendaire. Vous voyez l'écrivain, vous avez ses livres, pourquoi en demander davantage? Manie d'Occidental... L'oeil s'assombrit, les coins de la bouche s'affaissent. Un mouvement d'exaspération, un "C'est vous qui l'aurez voulu" chuchoté - une opération de la gorge l'a privé de ses cordes vocales - et l'écrivain nous conduit dans le ventre de l'hôtel, jusque dans l'ascenseur de service - celui des clients est en panne! Un couloir étroit, quelques marches, un tour de clef et la porte s'ouvre sur une chambre minuscule qui donne sur une cour sombre. Les murs sont recouverts d'une tapisserie beige; la moquette a connu des jours meilleurs; un vieux rideau masque ce que l'on suppose être un cabinet de toilette. Des sacs en plastique s'entassent entre le lit et l'armoire. Sur une tringle, deux vestes. A côté de la porte, une planche noire posée sur deux tréteaux fait office de bureau. Une lampe de guingois, un pot à crayons, des monceaux de papiers et, sous la poussière, quelques livres. C'est donc ici que l'Egyptien a écrit ses sept romans, dont l'action se déroule pourtant dans les quartiers populaires du Caire et les souks d'Orient: "Je suis un écrivain de langue française, mais je suis par-dessus tout égyptien. Je vis ici comme je vivais en Egypte." On regarde alors la chambre autrement. Comme une bulle hors de l'espace et du temps, un sas entre l'Orient et l'Occident.
Le vieux monsieur s'est assis sur le lit défait et attend. Il s'est définitivement fermé. Vous vouliez voir, vous avez vu, et après? A l'évocation d'un livre ou d'un objet qui l'aurait suivi au long de son existence, il ricane en se tapant le front: "C'est une question idiote." Un long silence, puis l'?il s'allume, un sourire s'ébauche: "Si j'avais gardé tout ce qu'on m'a offert, je serais milliardaire. J'étais ami avec les plus grands artistes du siècle. Lorsque Giacometti me donnait un tableau, il savait que j'allais le vendre le lendemain. Cela me permettait de vivre quelque temps. Imaginez la valeur de ces toiles aujourd'hui." Chez les Cossery, on ne gagne pas d'argent, on en trouve: "Gagner est un mot obscène, un terme de commerce. Je hais l'argent et l'ambition, ils sont la cause de tous les malheurs du monde. En Orient, lorsqu'on a de quoi vivre, on ne travaille pas. Mon père et mon grand-père n'ont jamais travaillé. Ils n'étaient pas riches, mais les terres qu'ils possédaient nous permettaient de vivre bien. En cas de problème, ma mère vendait un bijou. En Occident, plus on a d'argent, plus on en veut. On fait même du fric en écrivant sur sa maladie." Furieux, il griffonne sur un bloc de papier: "Je suis le seul écrivain à qui le cancer n'a rien rapporté!"
A l'image des mendiants philosophes, des voleurs magnifiques et des fainéants cultivant l'humour et la dérision qui traversent ses livres, Albert Cossery a banni de son existence les biens de ce monde et érigé la paresse en art de vivre et en outil de résistance contre la vaine agitation de ses contemporains. Comme Gohar, Gala ou Ossama, il a choisi la liberté, stigmatisant l'infamie des puissants et la veulerie de leurs courtisans. S'ils changent de nom au fil des romans, ses personnages sont toujours les mêmes. : Des rebelles pacifiques qui cultivent la pauvreté pour n'avoir rien à perdre Ici, on les appelle des marginaux. Mais ce sont eux les vrais aristocrates. Ils n'ont d'intérêt que pour la vie. Comme moi." Aujourd'hui, le Saint-Germain qu'il aimait n'existe plus. Disparus aussi les amis: Camus, de quatre jours son cadet, Genet, Louis Guilloux, Mastroianni, Ferreri.
Albert Cossery est désormais seul, poursuivant ses promenades quotidiennes. Emergeant du sommeil sur le coup de midi, il sort acheter Le Monde. Commence alors une balade dans le quartier, invariablement ponctuée d'escales au Flore, au salon de thé Dalloyau et, si le temps le permet, d'une méditation sur une chaise du jardin du Luxembourg. C'est dans cet univers que sont nés ses sept romans, dont le dernier, Les couleurs de l'infamie, vient de paraître chez Joëlle Losfeld. Pourquoi si peu? "Pourquoi davantage?" ironise le vieux jeune homme qui continue à bouder. "Je peux passer six mois sans rien écrire, à penser à une phrase; appelez ça de la paresse, si vous voulez. Pour moi, c'est de la réflexion." Pourquoi écrit-il? Pour qu'un jour un lecteur, en refermant l'un de ses livres, décide de ne plus jamais retourner au travail et rejoigne le royaume des amoureux du sommeil, des gueux philosophes et magnifiques.
Par Alexie Lorca (Lire 01/12/1999)
Depuis 50 ans, l'écrivain égyptien vit dans un hôtel de Saint-Germain-des-Prés. Le «mendiant philosophe» a érigé la paresse en véritable art de vivre.
C'est un hôtel rue de Seine, dont les fenêtres s'ouvrent sur l'étal d'un marchand de quatre-saisons. L'enseigne déroule sur le mur blanc ses hautes lettres: La Louisiane. Un voyageur sans bagage y débarque un jour de 1952. Albert Cossery a quitté Le Caire sept ans plus tôt pour vivre à Paris. Destination logique pour un Egyptien qui a suivi toute sa scolarité dans des écoles françaises et écrit dans la langue de Molière. Ses parents sont morts depuis longtemps. Il a trente-deux ans, un peu d'argent et sous le bras un recueil de nouvelles, Les hommes oubliés de Dieu, qu'Henry Miller vient de publier aux Etats-Unis et que l'éditeur Edmond Charlot fait paraître en France.
Albert s'amuse. Le jour, il dort à Montmartre; la nuit, il fait la fête à Saint-Germain-des-Prés. Mais les dames qui le suivent chez lui sur le coup de quatre heures du matin se lassent: "Je leur disais, viens, c'est tout près; au bout d'une heure de marche, elles en avaient marre et je n'avais pas de quoi payer un taxi. Alors, j'ai laissé mon studio et je me suis installé à La Louisiane. J'y connaissais des filles..." A l'époque, l'hôtel accueillait une bonne partie de la gent littéraire et artistique germanopratine. Gréco, Sartre, Beauvoir, Mouloudji... y feront quelques séjours, le temps d'une jeunesse engagée ou désabusée. Cossery y reste. La chambre 58 devient son unique lieu d'écriture, le miroir parfait d'un homme qui n'a d'autre ambition que de jouir de la vie, le reflet exact d'une oeuvre qui érige le dénuement en philosophie.
En ce jour d'octobre, le vieux monsieur longiligne à la mise parfaite qui nous reçoit dans le salon de l'hôtel rechigne à montrer cette chambre devenue légendaire. Vous voyez l'écrivain, vous avez ses livres, pourquoi en demander davantage? Manie d'Occidental... L'oeil s'assombrit, les coins de la bouche s'affaissent. Un mouvement d'exaspération, un "C'est vous qui l'aurez voulu" chuchoté - une opération de la gorge l'a privé de ses cordes vocales - et l'écrivain nous conduit dans le ventre de l'hôtel, jusque dans l'ascenseur de service - celui des clients est en panne! Un couloir étroit, quelques marches, un tour de clef et la porte s'ouvre sur une chambre minuscule qui donne sur une cour sombre. Les murs sont recouverts d'une tapisserie beige; la moquette a connu des jours meilleurs; un vieux rideau masque ce que l'on suppose être un cabinet de toilette. Des sacs en plastique s'entassent entre le lit et l'armoire. Sur une tringle, deux vestes. A côté de la porte, une planche noire posée sur deux tréteaux fait office de bureau. Une lampe de guingois, un pot à crayons, des monceaux de papiers et, sous la poussière, quelques livres. C'est donc ici que l'Egyptien a écrit ses sept romans, dont l'action se déroule pourtant dans les quartiers populaires du Caire et les souks d'Orient: "Je suis un écrivain de langue française, mais je suis par-dessus tout égyptien. Je vis ici comme je vivais en Egypte." On regarde alors la chambre autrement. Comme une bulle hors de l'espace et du temps, un sas entre l'Orient et l'Occident.
Le vieux monsieur s'est assis sur le lit défait et attend. Il s'est définitivement fermé. Vous vouliez voir, vous avez vu, et après? A l'évocation d'un livre ou d'un objet qui l'aurait suivi au long de son existence, il ricane en se tapant le front: "C'est une question idiote." Un long silence, puis l'?il s'allume, un sourire s'ébauche: "Si j'avais gardé tout ce qu'on m'a offert, je serais milliardaire. J'étais ami avec les plus grands artistes du siècle. Lorsque Giacometti me donnait un tableau, il savait que j'allais le vendre le lendemain. Cela me permettait de vivre quelque temps. Imaginez la valeur de ces toiles aujourd'hui." Chez les Cossery, on ne gagne pas d'argent, on en trouve: "Gagner est un mot obscène, un terme de commerce. Je hais l'argent et l'ambition, ils sont la cause de tous les malheurs du monde. En Orient, lorsqu'on a de quoi vivre, on ne travaille pas. Mon père et mon grand-père n'ont jamais travaillé. Ils n'étaient pas riches, mais les terres qu'ils possédaient nous permettaient de vivre bien. En cas de problème, ma mère vendait un bijou. En Occident, plus on a d'argent, plus on en veut. On fait même du fric en écrivant sur sa maladie." Furieux, il griffonne sur un bloc de papier: "Je suis le seul écrivain à qui le cancer n'a rien rapporté!"
A l'image des mendiants philosophes, des voleurs magnifiques et des fainéants cultivant l'humour et la dérision qui traversent ses livres, Albert Cossery a banni de son existence les biens de ce monde et érigé la paresse en art de vivre et en outil de résistance contre la vaine agitation de ses contemporains. Comme Gohar, Gala ou Ossama, il a choisi la liberté, stigmatisant l'infamie des puissants et la veulerie de leurs courtisans. S'ils changent de nom au fil des romans, ses personnages sont toujours les mêmes. : Des rebelles pacifiques qui cultivent la pauvreté pour n'avoir rien à perdre Ici, on les appelle des marginaux. Mais ce sont eux les vrais aristocrates. Ils n'ont d'intérêt que pour la vie. Comme moi." Aujourd'hui, le Saint-Germain qu'il aimait n'existe plus. Disparus aussi les amis: Camus, de quatre jours son cadet, Genet, Louis Guilloux, Mastroianni, Ferreri.
Albert Cossery est désormais seul, poursuivant ses promenades quotidiennes. Emergeant du sommeil sur le coup de midi, il sort acheter Le Monde. Commence alors une balade dans le quartier, invariablement ponctuée d'escales au Flore, au salon de thé Dalloyau et, si le temps le permet, d'une méditation sur une chaise du jardin du Luxembourg. C'est dans cet univers que sont nés ses sept romans, dont le dernier, Les couleurs de l'infamie, vient de paraître chez Joëlle Losfeld. Pourquoi si peu? "Pourquoi davantage?" ironise le vieux jeune homme qui continue à bouder. "Je peux passer six mois sans rien écrire, à penser à une phrase; appelez ça de la paresse, si vous voulez. Pour moi, c'est de la réflexion." Pourquoi écrit-il? Pour qu'un jour un lecteur, en refermant l'un de ses livres, décide de ne plus jamais retourner au travail et rejoigne le royaume des amoureux du sommeil, des gueux philosophes et magnifiques.
creme_de_marron- Messages : 595
Date d'inscription : 01/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
Sa philosophie de la vie est sans doute devenue incompréhensible à la plupart, à une époque où l'on conjugue plus facilement le verbe avoir que le verbe être...
Durga- Admin
- Messages : 2792
Date d'inscription : 01/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
creme_de_marron a écrit:[
Albert Cossery mort en 2008 a vécu toute sa vie dans un hôtel du Quartier Latin, La Louisiane au 60 rue de Seine, et qui avait été surnommé l'hôtel des beatniks dans les années 60...
Je pense que tu confonds avec le Beat Hôtel de la rue Git-le-cœur et fréquenté par la beat generation....
hipnik- Messages : 1554
Date d'inscription : 01/08/2011
Re: Le livre que vous venez de terminer
Patti Smith : La mer de corail
Patti Smith et Robert Mapplethorpe se sont rencontrés en 1967 lorsqu’ils avaient vingt ans, à New York, où ils vécurent ensemble pendant plusieurs années. Leurs carrières respectives de musicienne et de photographe célèbres ne cessant plus, dès lors, de se croiser.
À la mort du photographe, en 1989, Patti Smith a livré sa vision de l’homme et de l’artiste dans un texte demeuré longtemps inédit — La Mer de Corail — où l’écriture, en prenant la forme d’un récit allégorique, joue avec des photographies de Robert Mapplethorpe choisies par Patti Smith elle-même.
Quand ce livre est sorti à New York en mai 1996, William Burroughs a écrit, en citant Tennessee Williams, que « Patti Smith fait résonner dans La Mer de Corail la cloche de la poésie pure ». (notes de l'éditeur)
Patti Smith et Robert Mapplethorpe se sont rencontrés en 1967 lorsqu’ils avaient vingt ans, à New York, où ils vécurent ensemble pendant plusieurs années. Leurs carrières respectives de musicienne et de photographe célèbres ne cessant plus, dès lors, de se croiser.
À la mort du photographe, en 1989, Patti Smith a livré sa vision de l’homme et de l’artiste dans un texte demeuré longtemps inédit — La Mer de Corail — où l’écriture, en prenant la forme d’un récit allégorique, joue avec des photographies de Robert Mapplethorpe choisies par Patti Smith elle-même.
Quand ce livre est sorti à New York en mai 1996, William Burroughs a écrit, en citant Tennessee Williams, que « Patti Smith fait résonner dans La Mer de Corail la cloche de la poésie pure ». (notes de l'éditeur)
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